Record mondial pour l’équipe XENON : Une nouvelle méthode pour rechercher la matière noire

Bien qu’aucune observation directe n’ait encore pu identifier la nature des particules à l’origine de la matière noire, la plupart des modèles théoriques actuels prévoient qu’elles interagiraient avec le noyau des atomes. Pour la première fois, les scientifiques de la collaboration XENON ont développé de nouvelles techniques d'analyse dans le but de chercher, dans les données enregistrées par le détecteur XENON100, les interactions possibles de la matière noire avec les électrons orbitant autour du noyau des atomes.

Cette analyse ne met en évidence aucun signal significatif, renforçant de nouveau l’hypothèse d’une nature extrêmement faible des interactions de la matière noire. Dans le contexte international actuel, les nouveaux résultats de la collaboration XENON sont particulièrement troublants puisqu’ils rejettent avec une précision sans égale l’ensemble des modèles proposés par les théoriciens dans ce cadre, en particulier, ceux qui avaient été proposés afin d’expliquer les observations de la collaboration DAMA/LIBRA. La controverse scientifique autour de la nature de la matière noire devrait donc être relancée autour d’un sujet toujours aussi mystérieux, encore positionné à la frontière de nos connaissances et de notre imagination.

Soutenue par le Conseil Régional des Pays de la Loire, l’Ecole des Mines de Nantes, le CNRS et l’Université de Nantes, l’équipe Xénon du laboratoire Subatech(1), sous la responsabilité de Dominique Thers, contribue depuis 2009 à la collaboration XENON mise en place et dirigée par Elena Aprile de l’Université Columbia à New-York. D’ores et déjà à l’origine de nombreux records autour de l’observation directe de matière noire, les membres de la collaboration ont réexaminé leurs données afin de rechercher des interactions possibles de la matière noire avec les électrons. Ces résultats font l’objet de deux articles publiés dans les revues "Science" et "Physical Review Letters".

A propos de l’expérience

Le détecteur XENON100 utilise 62 kg de xénon liquide ultra-pur et enregistre les signaux très faibles de charge électrique et de lumière attendus dans les collisions des particules rares de matière noire avec les atomes de xénon. L'expérience se situe dans le laboratoire souterrain du Gran Sasso en Italie (LNGS), protégé contre les rayonnements cosmiques par 1400 m de montagne. Contrairement à DAMA/LIBRA, également situé dans le LNGS, XENON100 est capable de distinguer entre la diffusion sur les noyaux et sur les électrons des atomes. Pour exclure des signaux de bruit de fond provenant de la radioactivité résiduelle localisée aux environs du détecteur, seuls les événements détectés dans les 34 kg de xénon liquide de la partie centrale sont considérés comme des signaux possibles. En outre, des couches de cuivre, de polyéthylène, de plomb, et d’eau protègent le détecteur de ce bruit de fond. Grâce à toutes ces précautions, le signal de bruit de fond est plus faible d'un facteur 100 par rapport à celui mesuré par DAMA/LIBRA et même plus petit que l'amplitude de la modulation annuelle mesurée.

Dans ce contexte, la collaboration XENON a analysé ses données afin d’estimer le taux de diffusions sur les électrons des atomes et de rechercher des variations temporelles potentielles. Pour cela, il a été crucial de bénéficier de la très grande stabilité du détecteur pendant les 225 jours effectifs de l'acquisition de données qui s’est déroulée sur une période totale d'environ 500 jours. Les scientifiques ont également analysé tous les paramètres thermodynamiques pertinents du détecteur et vérifié la stabilité de l'analyse et des contributions du bruit de fond. Ils ont cherché d’éventuelles variations dans le temps du signal de matière noire au moyen d’une méthode d’analyse spécifique. Aucune modulation significative du signal n'a été trouvée dans les données couvrant les 500 jours – ce qui est en contradiction avec l'observation de DAMA/LIBRA.

(1) Laboratoire commun à l’École des Mines de Nantes, à l’Université de Nantes et au CNRS.
Publié le 01.08.2015

par IMT Atlantique