Plate-forme Arago : un accélérateur d’innovation pour l’industrie

Favoriser et accompagner le développement industriel des entreprises : telle est la vocation des plates-formes d’IMT Atlantique. Dédiée aux matériaux et technologies intelligents pour l’industrie du futur (impression additive, réalité mixte, cobotique, biocapteur etc.), la plate-forme Arago permet aux grands groupes et surtout aux TPE et PME de tester de nouvelles idées, de réaliser des prototypes ou de mettre au point des dispositifs de fabrication. Elle joue un rôle d’accélérateur de transfert de savoir-faire et de technologies au profit de l’industrie.
« L’innovation sur le plan industriel, aujourd’hui, passe par la création de nouvelles filières technologiques très transversales », souligne Jean-Louis de Bougrenet de la Tocnaye, responsable de la plate-forme. Plus de transversalité, plus d’intelligence distribuée, plus de flexibilité dans les outils de production aussi : telle est la nouvelle donne, à la fois technique, industrielle et économique.

«On voit aussi émerger de nouvelles pratiques de la part des grands groupes (un exemple est donné par les Big Pharma lors de la crise COVID) qui visent à externaliser au maximum la recherche à risque, poursuit Jean-Louis de Bougrenet de la Tocnaye. Elles encouragent et soutiennent la multiplication de start-ups pour acquérir les gagnantes, s’évitant ainsi de lourds investissements humains et matériels. La situation des PME est différente car elles ont rarement les moyens de mener une recherche de haut niveau intense en interne. Dans les deux cas, il est nécessaire de créer un environnement adapté à ces nouvelles formes de pratiques industrielles. C’est le rôle des plates-formes comme la nôtre, capables d’intégrer différentes technologies avancées en y associant de l’intelligence. C’est un nouveau modèle promis à se développer dans le futur et qui est très différent de l’offre traditionnelle faite aux entreprises.»

Un large éventail de prestations

La plate-forme Arago pratique couramment le « dérisquage »: «L’industriel nous soumet un problème à résoudre - par exemple une idée de produit, sur laquelle il s’interroge et pour laquelle il n’a pas envie ou les moyens d’investir, explique le responsable. Nous l’accompagnons en minimisant le risque financier et en allégeant le poids des contraintes administratives».

La plate-forme offre ainsi un accès aux salles-blanches, à ses équipements et à un accompagnement par des ingénieurs qualifiés. L’industriel peut être admis en résidence pour tester des matériaux, élaborer des prototypes et concevoir des procédés de fabrication. Arago leur permet avant tout de se familiariser avec un ensemble de technologies avancées (cristaux liquides, polymères composites, micro-optiques, électronique organique, opto-mécatronique etc.), leur miniaturisation sous forme de systèmes embarqués connectés, et donc de se former aux technologies de demain. Au plan administratif, l’entreprise bénéficie de dispositifs à la carte : contrats bilatéraux, subventions d’agences publiques et aides diverses, montage de dossier de demande de subventions. Arago est labellisée nationalement Carnot Transformation Société Numérique (TSN) gage pour eux d’acquérir des technologies innovantes dans ce secteur.

Une aide à l’emploi de chercheurs

Le plan France Relance a constitué une aide précieuse pour certaines entreprises partenaires d’Arago. Il a permis de financer à 80 % la prise en charge d’ingénieurs en CDI et le recrutement de CDD, à savoir deux sur deux ans au sein de la TPE Eyes3Shut (un CDI et un post-doc), de même pour la société Nexter, maintenant ainsi le niveau de recherche dans le contexte difficile de la pandémie.
Pour rémunérer ces services, la plate-forme propose diverses formules : facturation de conseil à l’heure, location de machine à la journée, détachement d’ingénieurs-chercheurs d’IMT Atlantique. Même souplesse pour la gestion des droits de propriété intellectuelle : paiement de royalties, brevets en copropriété, contrats sur mesure via l’Institut Mines Télécom rattaché au ministère de l’industrie, dans un paysage académique rarement simple dans ce secteur.
Enfin, la plate-forme réunit un vaste réseau de partenaires:  des grands groupes comme Valeo ou Nexter, mais aussi une trentaine de PMI comme Oberthur, avec lesquelles Arago collabore régulièrement, ainsi que des PME, TPE et start-ups - à commencer par celles issues de l’incubateur de l’école. A cela s’ajoutent les liens avec d’autres établissements du groupe Institut Mines-Télécom comme IMT Nord Europe et Mines Saint-Etienne, ainsi que des relations permanentes avec le pôle de compétitivité du Grand Ouest EMC2, dédié aux matériaux et à l’industrie du futur, et l’IRT B<>com. Bref, un écosystème indispensable à l’émergence et à la maturation de transferts technologiques et donc à la réindustrialisation du pays.

Des projets très prometteurs

Cet ensemble compte déjà quelques succès. Avec Nexter, Arago a ainsi aidé à la conception d’une « peau mimétique » à base de cristaux liquides pour le camouflage des véhicules blindés du futur. Une ligne pilote a été mise au point au sein de la plate-forme. Cette technologie trouvera des débouchés naturels dans les textiles intelligents, notamment pour les fantassins de demain. Le procédé est aussi envisagé pour la carrosserie automobile.
Autre exemple, la mise au point avec la société Oberthur Fiduciaire à Rennes, d’un matériau de surface produisant des effets visuels, et destiné à la lutte contre la contrefaçon de billets de banque. De nombreux brevets communs ont été déposés.
De même, Arago accompagne l’entreprise Eyes3Shut , spécialiste des lunettes 3D multi-media, sur un projet de lentilles de contact intelligentes, dotées d’une fonction d’analyse du comportement oculomoteur, avec un système de relai de l’information, communiquant avec des casques de réalité augmentée. Le projet intéresse plusieurs grands industriels de la santé et de la défense.
« De façon générale notre démarche vise à anticiper les innovations, résume Jean-Louis de Bougrenet de la Tocnaye. Pour cela, nous cherchons à convaincre certains entrepreneurs de participer à la création de nouvelles filières dans le domaine NBIC en lien avec les laboratoires les plus avancés sur le sujet. Nous favorisons ainsi l’émergence de nouvelles filières et contribuerons à l’effort de réindustrialisation. » Les résultats sont déjà au rendez-vous : l’activité de la plate-forme affiche un chiffre d’affaire en croissance régulière qui permet d’entrevoir de nouveaux modèles de financement de la recherche publique auquel tôt ou tard il faudra penser.
Quelques obstacles restent à lever, le principal résidant sans doute dans les pesanteurs administratives et la complexité réglementaire croissante. « Devoir sans cesse justifier le moindre euro, rentrer dans des processus d’évaluation trop longs et au résultat imprévisible rend le système peu agile, peu réactif, déplore Jean-Louis de Bougrenet de la Tocnaye. Cela décourage parfois les meilleures initiatives et pousse souvent les chercheurs à renoncer à franchir le pas du transfert technologique… »