Des énergies renouvelables jusqu’à en diminuer la qualité de service ?
Une fois que ce genre de contrainte est écartée, il s’agit de calculer la part maximale d’énergies renouvelables à incorporer dans le mix énergétique avec le moins de conséquences possibles sur la qualité du service mobile. L’ensoleillement et la force du vent sont par nature sporadiques. La diminution brutale de la production d’un champ éolien ou d’une ferme de panneaux solaires d’un opérateur peut alors avoir des conséquences directes sur la disponibilité du réseau : pas d’énergie, pas de stations de bases allumées.
Loutfi Nuaymi souligne que ces limites montrent la complexité du développement des algorithmes : « Nous ne pouvons pas juste considérer le montant de la facture énergétique de l’opérateur. Nous devons aussi prendre en compte la part minimale d’énergies renouvelables qu’il souhaite pour que ses pratiques collent aux attentes des consommateurs, la distribution moyenne du débit pour satisfaire les utilisateurs… »
Les résultats des recherches dans ce domaine montrent que dans la plupart des cas, il est possible de porter à 40 % la part d’énergies renouvelables dans le mix énergétique en n’accusant une diminution de la qualité du service que de 8 %. En heures creuses, cette altération est alors légère et n’entrave pas de manière significative l’accès au service des usagers du réseau.
Et même dans le cas d’une forte réduction de la qualité de service, Loutfi Nuaymi a des solutions : « Nous avons travaillé sur un modèle d’abonnement mobile qui retarde les appels si le réseau n’est pas disponible. L’idée reprend le principe du surbooking pour les avions : les abonnés volontaires — qui ne sont pas obligés de souscrire à cet abonnement bien entendu — acceptent de prendre le risque que le réseau soit indisponible temporairement, et reçoivent en contrepartie une compensation financière s’ils sont entravés dans leurs usages. »
Bien que ce nouveau format d’abonnement ne soit qu’une piste de réflexion pour les opérateurs, et que sa réalité soit encore loin, il montre les transformations possibles dans le secteur des télécommunications dues aux questions énergétiques. Des interrogations sont parfois soulevées sur le futur du métier d’opérateur mobile. Compte tenu de la consommation de leurs installations, et de l’essor des smart grids permettant une meilleure gestion de l’autoproduction et de la revente d’électricité, ces acteurs du numérique pourraient être amenés à terme à devenir de réels acteurs de l’énergie.
« La question est ouverte, et les débats vont bon train sur ce sujet » atteste Loutfi Nuaymi. « Certains pensent que l’énergie est un métier à part, d’autres que rien n’empêche de vendre l’énergie collectée. » La controverse pourrait être tranchée par de nouveaux travaux scientifiques, auxquels participe également le chercheur : « Nous faisons déjà des calculs technico-économiques pour étudier les perspectives des opérateurs. » Des résultats attendus, pourrait bien survenir une transformation significative du marché de l’énergie et des télécommunications.